Etalon Frison. Relativement grand. Age moyen.
Quelques blessures. Porte l'odeur des humains.
Soir hivernal. Crépuscule.
Temps froid et sec
Roleplay: une dizaine de lignes par réponse en moyenne. Memories ~Ce monde, il l'a connu avant même de le voir. Il le sentait, il l'entendait. Il sentait le monde gronder en lui, il se sentait voler au rythme des courses folles de l'univers. Il entendait claquer la matière au rythme des foulées, il entendait des voix qui l'appelaient. Yeux clos, il écoutait. Il ressentait. Il ressentait l’extérieur, et il ressentait la poche étroite qui le contenait. Il ressentait la chaleur, il ressentait la douceur. Il se savait dans son unique domicile. Il savait qu'ici il était chez lui, et sera toujours chez lui. Une sensation forte qui le prenait tout entier, la sensation d'appartenir pleinement à cet endroit.
Puis, un jour, l'appel de l’extérieur augmenta sa pression. Il savait qu'il y avait quelque chose à faire. Son domicile l'expulsa. Il quitta brusquement la chaude poche de douceur et se retrouva soudainement dans un environnement froid et hostile. Il tremblait tandis qu'il ouvrait les yeux pour la première fois. Choqué. Il ne comprenait pas ce qui lui arrivait. Il avait quitté le foyer auquel il appartenait pour se retrouver dans un endroit froid où stagnait une matière gazeuse qui lui semblait désagréable. Le gaz inconnu le pénétra jusqu'à s'installer en lui, gonflant son jeune poitrail. Il ouvrit la bouche comme pour crier, mais pas un son ne dépassa de ses lèvres. Ce gaz qui s'incrustait en lui devait ne plus jamais le quitter.
Un souffle. Mouvement de matière. Une sensation chaude près de ses oreilles. Il leva le regard vers la masse immense qui s'était approchée de lui. Il frémit au contact du souffle. Mouvement gazeux, mais pourtant cette fois agréable. Comme si son instinct lui dictait d'aimer ce souffle.
Il découvrit alors une nouvelle sensation: l'humidité. Un liquide chaud avait caressé ses oreilles et son front, étalé par une langue épaisse. Il leva son museau vers la forme immense qui entreprit de le lécher intégralement, le débarrassant de son vêtement, comme pour lui signifier qu'aucun retour en arrière ne serait-possible. Il n'appartenait plus à son monde. Il n'appartenait plus à aucun monde. Il savait que sa place n'était pas ici. Il savait qu'il n'avait sa place nulle part ailleurs d'autre que dans cette poche chaude et tendre qu'il avait connu. Au sein de sa mère.
La Grande. Il devrait l'appeler "maman", mais il ne connaissait pas ce mot.
~
Petit à petit, il apprit à découvrir le monde qui l'entourait. Dans un premier temps, cet univers lui paraissait immense. Il y avait tant de choses ici! Mais, pourtant, il s'en lassa rapidement. Finalement, ce monde n'était pas tellement plus grand que celui qu'il avait connu.
Et surtout si inconfortable.
Le sol était recouvert d'éléments filandreux qu'il mâchonnait lorsqu'il s'ennuyait, après avoir vu faire La Grande. Il y a des couleurs différentes: du gris, du brun, et un peu de rouge.
L'air est froid et sans tendresse. Parfois, un rayon de lumière arrive jusqu'au regard et blesse les yeux.
Ce morceau de monde est cerclé d'une matière froide qui, parfois, s'ouvrait sous la main des Choses.
Les Choses, ce sont des êtres qu'il ne sait expliquer. Il sait qu'ils ne sont pas comme lui et La Grande. Il ne sait pas si il peut les considérer comme étant vivants, puisqu'ils ne sont pas comme lui. Ils ne parlent pas son langage, mais ils semblent pourtant en avoir un, certains de leurs sons ont une signification.
Il y avait aussi les Autres, qu'il rencontrait lorsque la Chose laissait une ouverture dans le mur. Eux étaient de son espèce. L'un d'entre eux lui parla un jour:
"Pauvre Petit. Tu ne devrais pas être ici. Ce monde n'a pas de sens. Tu aurais mieux fait de ne pas vivre. Notre sort, notre histoire, notre vie n'ont aucun sens. Notre rôle, leur comportement, ce que nous faisons, cela n'a vraiment pas de sens. Comprendrais-tu? Qui peux comprendre.... Personne, car cela n'a aucun sens. On ne peut pas comprendre ce qui n'a pas de sens."
Il ne pouvait pas comprendre. Il était trop jeune. Il ne connaissait rien au monde. L'Autre, lui, connaissait peut être d'autres choses.
~
Il finit par grandir. Il fut séparé de La Grande. Il la retrouvait seulement le soir, sous le grand chapiteau, où il effectuait machinalement les tours que le fouet lui avait enseignés. Pourquoi le frapper pour le pousser à se dresser sur ses pattes arrières ou se coucher au sol? Il suffirait de le lui demander, lui expliquer ce que l'on attend de lui. Cela n'a pas de sens. Il ne comprenait pas pourquoi il devait faire ca. Chaque soir, il dansait avec les Autres, et il ne comprenait pas le sens de cette cérémonie quotidienne. Il ne le comprendra jamais.
Nowaday ~D'autres êtres étaient venus. Ils étaient de la même espèce que ceux qui le faisaient danser tous les jours, mais il ne les avait jamais vus. Sans doute étaient-il de ceux qui se tiennent dans l'ombre chaque soir, immobiles autour de la piste, criants et frappant de leurs mains.
Ils ont ouvert la porte et l'ont laissé sortir. Il hesita, regardant avec craintes ces mains posées sur lui. L'une passa lentement sur son encolure, tandis qu'une autre montait le licol vers son visage.
Et puis, il n'eu plus envie. Il en avait déja assez d'être soumis aux Choses, il ne voulait plus obeir encore à ces inconnus.
Il se redressa brusquement, battant l'air de ses antérieurs. Cela eloigna les êtres, visiblement bien plus craintifs que ceux qu'il cotoyait habituellement. Il bondit en avant, les bouscula, et parti au grand galop. C'était la première fois qu'il courait ainsi, sans limite de vitesse ni d'obstacles. Il ne savait pas où il était. Il n'était pas sous le chapiteau. Il ne voyait plus de limite, le monde s'étendait à perte de vue. Il y avait des êtres mobiles partout, qui criaient, certains semblaient se battre. Il ne s'attarda pas. Il parti, vite, le plus vite qu'il le pouvait. D'instinct, il s'éloignait des formes carrées et bruyantes pour se rapprocher du vert qui l'appelait au loin. Bientôt, l'odeur des êtres disparu et laissa place à une odeur nouvelle. Une odeur forte, qui semblait vouloir reveiller quelque chose de caché en lui. Une odeur gourmande, fraiche, une odeur vivante.
S'arrêtant, il plongea son museau dans l'herbe verte qui pointait entre ses sabots et en arracha plusieurs bouchées. Ses oreilles guettaient le moindre bruit alentour. Le vent faisait bouger les arbres, des arbres immenses. Il redressa la tête et regarda derrière lui.
Plus jamais, se dit-il.
Il repartit au galop, loin, plus loin encore dans ces steppes immenses qu'il voyait devant lui.
Jusqu'à ce qu'il ralentit, freiné par un besoin pressant.
Son corps lui réclamait de l'eau. Mais il n'y avait plus d'abreuvoir. C'est là qu'il comprit que la liberté avait un prix.
Le prix de l'inconnu. Il ne savait rien de ce monde, encore moins qu'il n'avait pu comprendre celui dans lequel il vivait. Il ne savait pas s'il était seul ici ou s'il existait autre chose encore. Il ne savait pas s'il pouvait survivre en mangeant l'herbe, et il ne savait pas comment s'abreuver en l'absence de son abreuvoir.
Il avança, lentement, tête basse. Il avait perdu sa fougue. Il songeait à faire demi-tour. Il avait déja connu la douleur causée par l'absence prolongée d'eau et de nourriture et ne désirait pas renouveler volontairement l'experience.
Alors, il marcha sans se guider, il marcha au hasard. Il savait que s'il y avait une voie à suivre, il la trouverait.
Une odeur finit par capter son attention. Il s'approcha. Quelque chose courrait dans l'herbe. Quelque chose d'immense: il n'en voyait ni le début, ni la fin. Long et allongé comme une longe. Il s'approcha de la chose et l'effleura de son museau. Et, enfin, il bu. Il bu à grandes gorgées cette eau sauvage qui courait dans l'herbe sur sa piste infinie.
Il secoua son museau, faisant gicler l'eau qui, aussitot retombée, reprenait sa course folle. Il l'observait, perplexe. Concentré, il ne remarqua pas l'arrivée d'une certaine présence.