L'air frais agita sa queue panachée. L'étalon brun observait en silence chacun des gestes, chacune des réactions de la jument. Il s'instruisait, en quelque sorte. Il essayait de comprendre, il cherchait une solution pour parvenir à la rassurer, pour pouvoir l'aider. Il engloutissait des tonnes et des tonnes de mots qui lui venait à l'esprit. Il notait dans un recoin de son cerveau chaque constat qu'il pouvait faire, chaque détail qu'il voyait, chaque acte que la jument faisait, même si tout cela paraissait anodin. Car le beau mâle était certain qu'il pourrait utiliser toutes ses observations plus tard, pour interpréter mieux encore les réactions des anciens humains. Il comprit rapidement que l'équilibre n'était pas le même. Que les humains devaient, avant de devenir équidé, avoir l'habitude de tenir et de marcher sur deux pattes uniquement. Et que quatre jambes à gérer, c'était beaucoup, c'était nouveau, c'était dur. Ensuite, il comprit devant l'air effaré, ahuri de la jument que la vision était sans doute moins développée chez les bipèdes. L'inconnue agitait la tête, bougeait ses yeux de manière particulièrement étrange. Oui, les humains devaient voir d'une autre façon que la leur. Souviens-Toi savait déjà que l'odorat des chevaux était nettement plus aiguisé que celui des hommes. Aussi il était à présent certain d'avoir était repéré. Pourtant il continua son observation, attentif. Il se doutait bien que la jument devait être terrorisée, qu'elle devait se poser des questions, qu'elle s'interrogeait sûrement sur son sort, et qu'elle espérait sortir vivante de cette transformation et de ce nouveau mode de vie. Alors il s'avança lentement vers elle, sortant de l'ombre rassurante des arbres enlacés. Il esquissa un mince sourire rassurant, dans l'espoir qu'elle se calme, car elle paraissait bien agité, chamboulée par tant de rebondissements dans sa vie sans doute plutôt plate auparavant. Souviens-Toi s'arrêta à quelques mètres d'elle.


/ Bienvenue, mademoiselle. Mon nom est Souviens Toi. /