Illusion... [ Pv Fire Light ]

Invité

L'amour n'est qu'une illusion dont on se sert pour se tromper soi-même.

Pour la énième fois, elle glissa et se rattrapa aisément. Elle profitait pleinement de ses atouts de cheval pour le première fois. A présent, elle maîtrisait aisément toutes les allures et la majorités de ses aptitudes équines. Ses fines jambes se déplaçaient avec grâce sur les pentes glissantes de l'ancien volcan. Ses sabots, délicats, s'enfonçaient dans la terre humide sans pour autant perdre de leur efficacité. Sa queue, protée haute, ajoutait à la grâce de sa crinière maintenue en mouvement par la petite brise que son déplacement provoquait. le sommet serait bientôt là. Elle arriva dans une forte côté, et enfin, contempla la beauté à l'état pur, intacte.

Les eaux d'un bleu parfait étaient teintées par endroit d'une vert turquoise, les paris noires de l'ancien volcan contrastant encore avec la vivacité des couleurs de l'eau. Une légère vapeur d'eau baignait le lieu dans une brume qui ne faisait que le rendre plus irréel. Lentement, Edelweiss s'avança vers un rocher bas, près de l'eau. Elle descendit prudemment, bien que subjuguée par la pureté de ce lieu.

Jamais l'Homme n'aurait pu créer tel lieu. Avec toute la technologie dont il dispose, baigné dans son illusion de perfection, l'Homme ne comprend pas qu'il n'est rien. Il souille la terre de son existence. L'Homme est le dernier, et il se croit le roi. La proie sans défense se croyant prédateur. Le cheval est toujours resté à sa place, s'effaçant lorsqu'il le devait. Il n'est pas permis à l'Homme de contempler pareille beauté. Au cheval, si.

Elle repéra, non loin, un rocher en pente douce. La jument blanche, dotée de cette beauté naturelle des arabes, s'approcha doucement, effleurant de ses naseaux l'eau immobile.L'eau était chaude. Elle releva la tête, émerveillée. Elle inspira la brise fraîche avec grâce, les naseaux délicatement relevés. Le vent, messager éternel et sans frontière, la força à revenir à la réalité, et comme si elle descendait d'un monde magique, elle contempla l'inconnu, quelque peu hébétée.

" Ils en auraient pleuré toutes les larmes de leurs corps;
la beauté était telle, somptueuse et insaisissable. "

L'étalon voguait dans ce décor de velours et silence. Son être gris s'écoulait entre la roche noire, avalait de sa personne l'atmosphère douce et poivre de la place.
D'un pas léger il délaissa sa carrure finement musclée à un découlé adroit et svelte.
Le jour se leva, il était ici depuis l'aurore.
C'est dans sa bordure esclaffée que s'écrasa le soleil dans l'enceinte bleu du volcan déchu. Orbe en son cratère, il roula de ses rayons, disséminant la poussière nacrée en une braise rouge et volute. L'incandescence même de la scène arracha Fire par ses bras crochus et poignants, exultant son cœur hors rebond, crevant cette poitrine fortuite et pleine d'ardeur.
Ce fût un gifle monumentale, mémorable, pourtant il était loin de la fin, très loin.
Son être se rapetissa en une fraction de seconde, le soleil maître époustoufla sa présence d'un plongeon lent et fascinant dans le lac de bleu. Doucement il roula, se pencha, pour finalement tomber à même l'eau, d'où il miroita toute l'imposture de ses rayons.
Coi, l'étalon en restait coi.
Ses yeux vissés sur cette lumière éreintante ne se quittaient plus de la surface azurée des flots. Un blasphème de beauté, il venait tout juste de participer à cette œuvre paysagiste, y vivre comme jamais, que ses yeux replongèrent dans la beauté du monde, ou plutôt sur, pour ce qui attendait.
Beauté, magnificence, la fragilité exacerbée du blanc sur le noir rocailleux.
Cette robe duveteuse, époustouflée d'attraits et mérites, gondolée d'un parfum ébène de tendresse.
Ses pupilles d'un gris bleu profond dévalèrent cette cascade olfactive de jouissance jusque la moindre parcelle.
Il tenta un mot, d'esprit, puis deux, mais rien n'y vint, il ne pouvait répertorier l'incompréhension.
Car cette figure, si prompte soit elle pour n'être qu'irréelle, se tenait dans toute l'éloquence qu'elle concevait au dessus du flot bleu de l'impassibilité du lac.
Mémoire, il dégrafa de ce portrait l'image tendre et nue de cette jument qu'il avait soutenue de puissance charnelle cette dernière nuit.
Mouillée et tremblotante, la respiration esquintée par le froid.
Puis maintenant se tenant à douceur de mot, crevant le paysage paré d'impossibilités de sa silhouette importune.
L'étalon s'avança, tout aussi hébété que cette magnifique créature et sans pour autant le faire voir.
Sa robe grisaille et terne plissait en elle les odeurs fines de la pluies et s'exerçaient lentement à parcourir son alentour.
Il regarda la belle comme il aurait avalé la vie à bras ouverts.
Le port, les traits, l'artifice exquis de sa race en plein éploie, rien d'équin, c'était tout autre chose.
Un autre chose qu'il ne connaissait pas, mais ne demandait alors qu'à connaître.
Du fond, au loin, bien plus bas que les échos boursoufflés des ravins, sorti sa voix grave et veloutée, fraiche et magnifique, suave et lovée entre granite.
Une voix d'eau fine, il la déploya aussi aisément qu'il le put.
Et en quelques mots se résuma entièrement.

- Quelle créature êtes vous ?

Invité

Toujours rassemblée au dessus du promontoire rocheux, les jambes légèrement rentrée sous elle, la jeune jument blanche tourna délicatement la tête. Sa mémoire se contracta, cherchant au fond d'elle-même pour retrouver celui qui, sans doute, l'avait arrachée des mains mortelles du froid de la rivière. Sa chaleur avait réchauffé ses veines glacées, son corps tiède l'avait réanimée. Sinon, elle se serait laissé sombrer dans le froid et serait sans doute à l'heure qu'il est une carcasse.

La beauté des lieux l'avait proprement envoutée. Le soleil se répercutant doucement sur les eaux immobiles, tels les gardiennes de ce lieu enchanté, les quelques libellules flottant doucement au ras de l'eau. Qui eut cru qu'une vie aussi complexe se serait développée à une altitude pareille ? Lorsqu'une voix simple et envoutante se répercuta dans cette beauté si exceptionnelle, la douce créature ne fut même pas tirée de son rêve éveillé, et elle répondit mécaniquement :

" Une humaine devenue cheval, tel est le plus lourd secret de mon existence... "

Ce fut un brutal retour sur terre. Comme si le nuage sur lequel elle se trouvait se trouait brutalement et qu'elle retombait sur terre sans parachute. Elle écarquilla les yeux, le souffle coupé parce qu'elle venait de dire. La peur lui tordit le ventre, son corps tout entier se tendit. Elle fixa un moment l'étalon, qui apparemment, digérait la nouvelle - ou cherchait le moyen le plus efficace pour éliminer cette erreur de la nature.

" Je..."

Elle fit un pas en arrière, sentit son poids basculer et l'eau chaude l'enveloppa. Plouf. Un instant, sa vue fut brouillée par l'eau du lac, puis elle remonta, et se retrouva au sec en moins de deux. Elle marqua une pause, surprise et déroutée, avant de s'ébrouer gracieusement, de fines gouttelettes coulant doucement le long de ses crins. Elle fixa un regard à la fois appeuré et suppliant à l'étalon.

* Oh pitié, faite qu'un, au moins, me comprenne. Oh, pitié.*

"Dites moi que vous êtes belle,
dites le moi seulement [...]"

Ses yeux lissèrent ce pelage blasphème et écrémant. La beauté le mettait en tel émoi qu'il perdait toute réactivité, et pourtant la voix fluide et cristalline s'écoula en lui comme une source tant attendue. Son regard se répercuta quelques fois à observer sa bouche créole, soulevant un parfum frais et floral. Il ne pu résister à l'enchantement, les paroles volubiles de son interlocutrice voletant dans l'air, pourtant, le poids des mots s'écrasa doucement sur ses épaules lorsque l'animation de sa tombé se fit.
Son sang se glaça quelque peu, mais la voyant aussi vite à berge il ne put s'empêcher de sourire.
Indéniablement ses iris éperdus s'enflammèrent des lueurs ravageuses de ses interrogations. Bonne politesse il s'attendit de parler, contemplant toujours de ce regard si profond la présence magnifique de cette compagnie.
Il avait eut raison:
La beauté de cette jument n'était qu'embellit lorsque l'eau suave coulait le long de ses formes. Il s'approcha, dès lors, puis s'arrêta non loin, sa voix panachée au fond de sa gorge, mais ne commentant aucunement.
Finalement il sourit apaisant, réconfortant cet air contrit qui esquintait le beau visage de la jument.
Un petit rire sardonique s'élucida du fond en comble de son être. Un rire charmant, qui n'avait rien à reprocher, juste teinté d'accords astreints et graves, voguant comme une petite mélodie dans l'amplificateur de la place.
Il reprit sagement contenance, baladant avec fraicheur sa cause.

- Vous devriez voir à quel point votre gène ne fait qu'amplifier votre beauté.

Il sourit ardemment, plantant ses yeux dans les siens, ne manquant sans aucun doute un bien plus beau spectacle que cette aurore délicate: Ses prunelles claires valsaient d'une raffinerie sans précédents, illuminées d'on ne sait quoi de surnaturel, quelque chose qui n'était pas équin, et il ne pouvait plus en douter.
Malgré les derniers mots de la jument, il ne les souleva pas, notant cet embarras il choisit d'éconduire cette discussion à plus tard, si la beauté accepterait toujours sa compagnie bien entendu.
Pourtant il ne démordrait pas, il ne pouvait plus, c'était déjà bien trop pour tout ses sens.
Politesse pure, il évalua les mots sans les soupeser, aisé dans ses dires.

- Je vous pris de m'excuser, je suis Fire Light, pour vous servir bien entendu.

Il lui accorda un petit clin d'œil sarcastique, celui que n'aurait manqué aucun étalon dragueur de faire, mais ici il était tellement dénaturé avec tout son être, qu'on ne pouvait aucunement se douter qu'il était placé de façon ironique, comme s'il s'apprêtait à l'aguicher. Tout au contraire, cela permettait de préserver une ambiance douce et légère, amicale et détendue.
Non, son but n'était pas de courtiser les belles juments, il aimait simplement les observer, et ça lui suffisait.
Pourtant, une brûlure amodié crachait sous sa poitrine.
Sa curiosité envers cet être était elle si forte ?
Il ne savait pas.

Invité

Qui eut crû qu'en ce jour,
au fond de tes prunelles noires,
Je pu trouver le secours,
Pour lequel je n'avais d'espoir ?

Ainsi, rien ne l'effrayait ? Pas même cette nature étrange dont elle était constituée ? Rien ne le perturbait en fixant ce regard légèrement bleuté, comme s'il plongeait dans une tristesse sans fin où l'ont se noie sans espérer de secours ? Edelweiss était soulagée. Surprise, mais c'est comme si ses délicates épaules étaient soulagées d'un poids qu'elles avaient trop longtemps porté. Mais il planait encore sur cette fragile alliance l'ombre satanique du doute et de la peur. Le lien était fragile, à eux de ne pas le rompre.
Elle le laissa s'approcher, se contentant d'effleurer doucement la silhouette de l'étalon. Il semblait soudain animé d'une admiration et d'une curiosité enflammée. Ni malsaine ni maladive, loin de là ses intentions, juste grande. Il s'appelait Fire Light. C'était, il fallait l'avouer, un nom magnifique. Aussi poliment qu'un bon gentleman l'aurait fait, il écarta délicatement le sujet épineux qu'elle avait malheureusement abordé. Elle se rendit soudain compte qu'un silence presque religieux s'était installé entre eux, et le sourire ironiquement aguicheur qu'il lui lança lui arracha un petit rire cristallin, vestige de son humanité.

" Edelweiss, ravie de vous rencontrer. "

C'est comme si un feu terrible lui brûlait le coeur. Sans doute était-ce la peur qu'elle éprouvait. Mais il lui fallait absolument aborder le sujet. A ses risques et périls, mais il le fallait.

" Ainsi, je ne vous rebute pas ? Vous n'éprouvez ni de la peur, ni du dégoût ? "

"Gémir, en douce, sans que l'on me voit.
Alors le doux ballotement de mon être se fit, entre les pénombres obscènes de la vie."

Quel triste regard il avait, gris bleu, ravagé, il n'équivalait en rien les prunelles tendues d'un bleu cristallin, si profondes, si douces et si mélancoliques. Il s'y attarda un peu trop.
Ses oreilles mouvèrent frénétiquement, Edelweiss ? Un sourire éclata sur son visage, il la couva longuement avant d'émulsionner sa contemplation.

- Quel nom magnifique, je ne pouvait vraiment m'attendre à mieux.

Ses paupières battirent quelques secondes sous terme de réflexion, il en était arrivé à la deuxième phrase de la belle. Il interpréta peu à peu ses mots, ses phrases et son attitude. Une légère escouade le traversa, elle semblait comme ... Paniquée, Ou peut-être pas, curieuse et affranchie ...
Sa belle tête andalousienne se reporta en avant, il s'avança de quelques pas.

- Je devrais ?

Il eut un rire grave et sincère, échelé par des notes aux accents lointain. Sûrement pas aussi beau de le rire d'Edel', mais tout aussi doux et vrai.

- Désolé, en fait je ne sais absolument pas de quoi vous parlez, le mot 'humaine' m'est inconnu, mais il est sûr que vous n'êtes pas du même monde que le mien divine créature. D'ailleurs j'ai quelques hypothèses là dessus ...

Il sourit profondément.

Invité

" Ce battement sourd et puissant,
est-ce bien mon coeur ? "

" Ainsi, vous n'avez jamais vu d'humain... "

" C'est sans doute mieux ainsi. "

" Et si nous marchions quelque peu ? "

"Douceur exigu des poètes aux entrains,
oh ma douce et belle de lys à son plein."

Il ferma les yeux quelques instants, battit la chamade des odeurs enivrantes de l'hiver de ses sinus alvéolés.
Sa queue fouetta l'air, il sourit distinctement, entreprit un pas volute aux courbes simples et mesurées.

- C'est avec plaisir, je dois reconnaitre quelques sentiers dans l'environ, si vous me le permettez.

Il tira clairement la langue, annonçant qu'il prenait pied de la balade avec ravissement, mais aussi qu'il comptait la satisfaire au delà de toute attente.
Doucement il ravisa les paroles qu'elle lui avait plus tôt déservi.

- Pourquoi est-ce mieux ainsi ? Votre présence m'est chère, je ne vois pas en quoi la 'soit nature' de votre être pourrait m'épouvanter, loin de là.

Il ne la regarda pas vraiment en laissant vaciller ses paroles, il était comme préoccupé, tracassé, pas dans le mauvais sens du terme, tout au contraire, il semblait prendre ce parti pour amusement, comme un jeux.
Il reposa délicatement ses prunelles dans les iris indigo de la belle, et toute la soif qui s'ensuivait se trouva tari, pour les moments à venir.

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